Le Conseil d’Etat a rendu le 30 décembre 2022 une décision assez surprenante en matière de contrôle des sanctions disciplinaires, bien que conforme à sa position sur l’examen de la proportionnalité.

Si la haute juridiction avait estimé que, bien que le choix de la sanction relève de l’appréciation des juges du fond, elle devait vérifier si la sanction retenue n’était pas hors de proportion avec la faute commise (arrêt CE 30 décembre 2014, n° 381245, au Recueil), ces contrôles n’avaient jamais encore conduit à juger une sanction comme étant insuffisante.

En l’espèce, un professeur d’université avait été révoqué par la section disciplinaire du conseil académique de Sorbonne Université et interdit d’exercer toute fonction dans un établissement public à la suite de son implication dans l’évacuation violente d’étudiants occupant un amphithéâtre de l’université de Montpellier en 2018.

En appel, la sanction retenue par le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) a été l’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur pour une durée de quatre ans avec privation de la totalité de son traitement.

En se basant sur les pièces du dossier et notamment sur la reconnaissance par le juge pénal pour la même affaire de faits de « violences commises en réunion suivies d’incapacité n’excédant pas huit jours, en récidive, et de faits de violences commises en réunion sans incapacité, en récidive » dans un jugement du 2 juillet 2021, ainsi que sur l’existence de sanctions plus sévères prévues par l’article L. 952-8 du code de l’éducation, le Conseil d’Etat a considéré que la sanction retenue était insuffisante :

« Dans ces conditions, en n’infligeant à raison de ces faits à M. A… que la sanction, prévue au 5° de l’article L. 952-8 du code de l’éducation cité au point 2, d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur pendant quatre ans, avec privation de la totalité de son traitement, et non une sanction prévue par les alinéas suivants de cet article, le CNESER, statuant en matière disciplinaire, a retenu une sanction hors de proportion avec les fautes commises ».

L’affaire a ainsi été renvoyée devant le CNESER afin de revoir la sanction. Cette jurisprudence confère in fine au juge suprême un pouvoir de sanction.

Myriam EL BADRAWI

Références : Conseil d’État, 30 décembre 2022, N° 465304